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[20220125]

GARGOUILLES by NICOLAS DESHAYES at LE CREUX DE L’ENFER [from 20211023 to 20220206]

[Photo: Vincent Blesbois]



[FR] Nicolas Deshayes réalise des installations, des sculptures, des bas-reliefs et des images. Il s’intéresse aux systèmes circulatoires, tuyauteries domestiques, productions industrielles et processus artisanaux. Né en France en 1983, il a étudié au Chelsea College of Art and Design et au Royal College of Art à Londres avant de s’installer à Douvres dans le Kent. Alors que son œuvre rencontre un écho grandissant au Royaume-Uni, en Allemagne ou en Italie, il présente sa première exposition monographique en France en deux lieux :

· Au Frac Grand Large de Dunkerque, Glissements propose un regard sur dix années de production.

· Au centre d’art du Creux de l’enfer à Thiers, où il développe des ensembles d’œuvres issus de nouvelles expériences plastiques menées en fonderie d’art et en thermoformage. Réalisées à partir de la fonte de différents métaux et plastiques, les œuvres jouent de grossissements organiques et de recherches de matières inédites, trouvant un écho avec la puissance du site de la Vallée des usines.

Nicolas Deshayes développe une œuvre multiple à l’esthétique abstraite et mutante, se situant quelque part entre deux éléments différents du faire : le geste organique et la production industrielle. Il opère au seuil du liquide et du solide et explore à rebours des surfaces nivelées, attentif à l’expression de la matière et aux contraintes qui la régissent, travaillant l’hybridation des corps à la mécanique d’objets domestiques, dans une relation décomplexée.

Les sculptures de Nicolas Deshayes sont réalisées à partir de diverses méthodes de moulages industriels, faites de matériaux solides tels que le plastique, la céramique, l'émail vitreux, l'aluminium, la fonte et récemment le bronze. Paradoxalement ses œuvres apparaissent molles, mobiles ou malléable, et suggèrent des choses ou des organes parfois mis en fonctionnement.

Au Creux de l’enfer, l’exposition Gargouilles évoque l’intérêt de l’artiste pour les systèmes organiques et digestifs, comme en témoignent des fontaines, exposées à l’intérieur du centre d’art, qui en sont les premières représentations. Poursuivant cette référence aux grotesques sculpturaux gothiques cracheurs d’eau, une nouvelle série de pièces en bronzes exhibent des morceaux de peau.

Au rez-de-chaussée, des fontaines en fonte d’aluminium se présentent sous la forme de lombrics dressés ondulants, se nouant ou s’enroulant à la surface d’un bassin d’eau intérieur.

Exposées pour la première fois dans les étangs du Battersea Park de Londres en 2018, cette série suggérait un réseau circulant d’égouts dont les eaux sales et leurs substances organiques s’écoulaient autrefois dans la Tamise.

Aujourd’hui présentées pour la première fois en France, leurs silhouettes boursoufflées animent une chorégraphie gracile et silencieuse, telles les danseuses d’une nage synchronisée exprimant les joies viscérales d’une existence muette. Affairées à un plaisir intime plus ou moins assumé, elles crachent, fouillent, pissent, éjaculent, semblant célébrer la fertilité des mondes aquatiques et souterrains. Ce ballet délicat, tout en retenu, contraste avec le vrombissement puissant de la cascade qui se déverse au pied du bâtiment.

Lors de sa résidence à Thiers dès 2019, Nicolas Deshayes a été particulièrement influencé par les mythes et légendes entourant le site du Creux de l’enfer. Le mythe de l’antre des fées sous la chute d’eau, du sacrifice de Saint Genès ayant corroboré l’interprétation funèbre du lieu ou encore la rumeur de la présence du diable ont cristallisé autour du lieu nombre d’images grotesques faites de têtes coupées, de créatures aquatiques, d'incendies, mêlés à l'art du feu ou du métal. Ce folklore dont s’est imprégné Nicolas Deshayes l’a mené ainsi à la création d’un ensemble de nouvelles pièces en fonte de bronze, présentés à l’étage du Creux de l’enfer.

Organe de surface et d’échange entre intérieur et extérieur, la peau y a été investie comme un territoire d’exploration formelle. Des points de vue rapprochés sur des surfaces lisses ou en relief, plissées, trouées, parfois parsemées d’un système pileux, échafaudent d’étranges paysages épidermiques évoquant les variations sensibles de la chair. Réalisée à partir du volume d’un pain de terre, chaque œuvre a été travaillée par modelage, faisant apparaitre une matière ligaturée, tranchée, parfois percée d’éléments organiques. Dans les pièces les plus récentes, un langage figuratif émerge dans l’œuvre. Des éléments dénaturés apparaissent comme des poils suggérant des forets en caoutchouc, un doigt démesuré, une baignoire contenant un ventre. Autant d’objets et de signes émergeants de l’histoire populaire du site ou qu’il a imaginés comme les indices d’un récit grotesque, délibérément étrange et onirique. Un écho revendiqué à l’œuvre cinématographique manifeste du surréaliste Luis Buñuel Un chien andalou (1929) et cette scène anthologique, aussi fascinante que répulsive, d’un œil fendu par la lame d’un rasoir.

Fasciné par la nature des matières les plus nobles comme les plus populaires, Nicolas Deshayes a également trouvé un écho insoupçonné avec la ligne de production de thermoformages médicaux produits par l’entreprise Cartolux à Peschadoires, près de Thiers, avec laquelle il a réalisé des modules plastiques, exposés aux murs. Leur matière brillante et transparente n’est pas sans rappeler les emballages sous-vide, matières triviales, à l’aspect à la fois mignon et répugnant.

Travaillant les contrastes dans l’échelle des objets, les oppositions de surfaces et de matières, mêlant désormais des éléments figuratifs à des ensembles abstraits, l’œuvre de Deshayes est équivoque, symbolique et triviale. Séduisante autant qu’inquiétante ou drôle, elle se nourrit de paradoxes où le corps est un vecteur de contradictions mais aussi un terrain d’expérimentations sans limite.

Né en 1983 à Nancy (France), Nicolas Deshayes vit et travaille à Douvres dans le Kent (Angleterre). Diplômé du Chelsea College of Art and Design en 2005 et du Royal College of Art de Londres en 2009, il réalise des installations, des sculptures, des bas-reliefs et des images. Il s’intéresse aux systèmes circulatoires, tuyauteries domestiques, productions industrielles et processus artisanaux. Les sculptures de Nicolas Deshayes sont réalisées à partir de diverses méthodes de moulages industriels, faites de matériaux solides tels que le plastique, la céramique, l’émail vitreux, l’aluminium, la fonte et récemment le bronze. Paradoxalement, ses œuvres apparaissent molles, mobiles ou malléables, et suggèrent des choses ou des organes parfois mis en fonctionnement.

Nicolas Deshayes a présenté son travail à E-werk, Luckenwalde (2019), Modern Art, Londres (2019); Basement Roma, Rome (2018); Tate St Ives, Cornouailles (2015), Glasgow Sculpture Studios, Glasgow (2015) et S1 Artspace, Sheffield (2013) Il a également participé à des expositions collectives a la Biennale de Belgrade (2021), Museo Ca’ Pesaro, Venise, (2019), Museion, Bolzano (2019), FRAC Grand Large, Dunkerque (2018); Tate St Ives(2017); Zabludowicz Collection, Londres (2016); Leeds City Art Gallery, Leeds (2015); Kestner Gesellschaft, Hanovre, et David Roberts Art Foundation, Londres (2014); Saatchi Gallery, Londres, et Wysing Arts Centre, Cambridge (2013); ainsi que White Columns, New York (2011).

[Text: Le Creux de l'enfer]





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